Il y a bien longtemps que j’ai arrêté de compter le nombre de messages reçus concernant la formation de thanatopracteur (beaucoup trop). J’ai remarqué que la plupart des questions posées trouvent leur réponse en quelques recherches Google. Pourtant, ce n’est pas à défaut de voir fleurir sur TikTok des comptes de thanato qui développent ce sujet de A à Z.
Si à une époque, les informations concernant l’accès au métier étaient difficiles d’accès et obscures, surtout de la part des organismes de formation, désormais les thanatopracteurs utilisent les plateformes publiques pour partager leur expérience. Bien ou non, dans la décence et la déontologie ou non… j’aborderai ce sujet plus tard.
A noter que le diplôme national de thanatopracteur est très souvent revu par le Ministère de la Santé. De nouveaux arrêtés datés de 2022 ont complètement changé les conditions d’accès au diplôme. De ce fait, je n’ai pas passé mon diplôme sous ces conditions, mais je me base sur les publications officielles actuelles.
Pour devenir thanatopracteur, il y a quatre étapes nécessaires : la formation théorique, le concours théorique, le stage pratique et l’examen pratique. Dis comme ça, on peut croire que c’est simple. Pourtant, chaque année il y a de nombreuses déceptions et abandons et des découvertes un peu froides sur la réalité du métier. Autant se préparer au mieux. Dans ce premier article, j’aborderai la formation théorique.
La formation théorique
La thanatopraxie n’est pas un métier vers lequel on peut bifurquer avec un diplôme de soignant ou une équivalence. Le métier est sous l’égide du Ministère de la Santé et il est absolument indispensable d’être détenteur du diplôme national de thanatopracteur pour exercer. La première étape vers l’obtention de ce diplôme sera la formation théorique.
Dans les faits, la formation théorique se doit d’être au minimum de 190h, sur un temps minimal de trois mois consécutifs. Les matières enseignées résultent d’un arbre de compétences fixé par le Ministère de la Santé. Chaque organisme de formation se doit de délivrer au minimum les heures de cours et les sujets imposés par cet arbre de compétences. Libre à eux ensuite d’enjoliver leur cursus avec d’autres matières et options, qui se ressentiront sur la facture finale.
Les prérequis officiels pour accéder à la formation théorique est d’avoir au minimum un niveau Bac ou équivalent, et 18 ans. Cependant, on observe très régulièrement des prérequis officieux mis en place par les organismes de formation : avoir le permis B, avoir fait des stages d’observation de soin auprès d’un thanatopracteur diplômé, être vacciné contre l’hépatite B (ce dernier est nécessaire, mais pas au stade de la formation théorique !) Légalement, ces prérequis officieux ne font pas office d’obstacle à l’accès aux formations.
La formation est ouverte à tout type de profil. Il n’est pas nécessaire d’avoir fait des études de médecine ou de sciences. Dans tous les cas, l’enseignement part du point 0 donc ne vous découragez pas si vous n’avez pas le « profil type », il n’y en a pas.
Les matières enseignées
L’arbre de compétences mis en place par le Ministère de la Santé regroupe huit branches distinctes :
- Thanatopraxie (65h)
- Réglementation funéraire (25h)
- Médecine légale (10h)
- Hygiène, sécurité sanitaire et responsabilité (30h)
- Ergonomie et manutention (10h)
- Histologie, anatomie, physiologie (3h)
- Gestion des entreprises (10h)
- Sciences humaines de la mort, éléments de déontologie et d’éthique (15h)
Le tableau complet des matières enseignées est disponible en Annexe 1 de l’arrêté du 10 février 2022.
Chacune de ces branches comporte des spécialisations différentes afin de brasser le maximum d’informations dans le temps imparti. Cela fait de cette formation un moment long et douloureux, avec un rythme très soutenu et un contenu très dense à encaisser. De plus, pour ne pas se retrouver submergé.e par le volume de travail, il est nécessaire de faire preuve de rigueur et de discipline tout au long de la formation.
Qui dispense ces enseignements ?
Pour la partie médicale, on retrouvera des enseignements universitaires de médecine, des médecins légistes ou des anatomopathologistes.
Pour la partie thanatopraxie, il s’agira de thanatopracteur.rices diplômé.es présentant au moins 5 ans d’expérience.
Pour le reste, libre aux organismes de formation de trouver les intervenant.es adapté.es.
Quelle formation choisir ?
Comme vu au dessus, la base de la formation se doit d’être la même pour tous. Il n’y aura jamais moins que ce que le Ministère exige. Malgré ça, il existe un panel assez varié d’organismes de formation, présentant plus ou moins bonne réputation et pourcentage de réussite au concours théorique. Mon but n’est pas d’influencer vers tel ou tel organisme, mais de vous donner les clés nécessaires pour faire votre choix.
Les organismes de formation sont majoritairement privés. On retrouve deux formations publiques, à l’université d’Angers et l’université de Lyon. Ces dernières sont très prisées pour cette raison.
Qui dit formation de niche, dit frais d’inscription élevés. Pour vous donner une idée des tarifs proposés, nous avons :
| Établissements | Type de formation | Prix |
| Université Claude Bernard (Lyon) | Diplôme Universitaire* (2 semestres) | 3900€ |
| Université d’Angers | Diplôme Universitaire* (190h) | 3500€ + droits universitaires |
| AFITT | Formation théorique distancielle ou présentielle (245h) | 5490€ |
| NOVA Formation | Formation théorique présentielle ou distancielle (315h) | 4800€ |
| EFFA Alyscamps | Formation théorique distancielle (190h) | 4800€ |
| Accent Formation | Formation théorique présentielle ou distancielle (420h, soit un peu plus 2 fois le minimum requis) | 4997€ |
| Accent Formation | Formation théorique présentielle ou distancielle (420h) + Formation pratique | 7997€ |
| Wilkins e Academy | Formation théorique distancielle (455h, soit presque 2,5 fois le minimum requis) | 7052,50€ |
*Il est important de noter qu’un Diplôme Universitaire (DU) ne garantit pas l’obtention du Diplôme National, il faudra quoiqu’il advienne décrocher le concours théorique et l’examen pratique. Le nom change mais la formation est la même.
Après recherches, l’Université Bretagne-Sud semble prévoir l’ouverture d’un DU de Thanatopraxie, dont la particularité sera d’offrir 35h de formation pratique en chambre mortuaire en plus du cursus légal. Personnellement, je trouve cet ajout intéressant en cas d’échec au concours théorique, car il permet de valoriser la formation et d’offrir un plan B aux étudiants. La formation semble prévoir aussi dans son cursus le stage pratique. A surveiller donc.
Les formations proposent pour la majorité des aides de financement, qu’il s’agisse du CPF, d’un employeur ou de Pôle Emploi. Pour ma part, Pôle Emploi a financé une partie de ma formation théorique, à hauteur de 2000€ (le maximum possible). Il faudra voir en fonction de votre cas personnel et de ce que l’organisme choisi vous proposera.
Les conditions d’accès en formation
Chaque organisme de formation a son propre protocole de sélection, mais on retrouvera toujours le même fonctionnement : un dossier avec lettre de motivation, une épreuve écrite, un entretien oral, la nécessité d’avoir fait une observation de soin avec attestation.
Les prérequis légaux du niveau Bac et équivalent, ainsi que l’âge minimum de 18 ans entrent aussi en vigueur, bien que certains organismes ne permettent l’accès à leur formation qu’à partir de 19 ans.
Pour l’épreuve écrite, pour ma part, il s’agissait d’un QCM global sur les sciences, l’anatomie, l’ostéologie et quelques notions de thanatopraxie. Rassurez-vous, rien d’insurmontable. Je n’avais pas fait de sciences depuis le lycée, et en potassant le programme de terminale scientifique, je m’en suis sortie sans problème.
L’observation de soin
Je l’ai déjà écrit, mais d’un point de vue officiel, l’observation de soin de conservation n’est pas obligatoire pour l’accès à la formation. Cependant, elle est omniprésente dans les conditions de sélection des organismes de formation. Et je pense aussi qu’elle est primordiale pour chaque aspirant thanatopracteur.
Il est tout à fait possible de savoir comment se déroule un soin de thanatopraxie, via les contenus en ligne de thanatopracteur.rices, différents articles scientifiques etc. Mais si connaître la procédure est une chose, la voir en est une autre. Entre ce que l’on imagine et la réalité, tout est différent. De ce fait, je pense qu’il est absolument nécessaire d’assister à un soin de conservation au moins une fois avant de prétendre candidater en formation.
Faire une observation de soin vous permettra de découvrir les lieux où un.e thanatopracteur.rice exerce, les odeurs, les sons… Pour beaucoup, il s’agira de voir un tout premier corps non-préparé, d’évaluer la réaction face à cette dépouille. Aussi, de découvrir les gestes d’un.e thanatopracteur.rice, les produits utilisés, le déroulé concret d’un soin. Cette observation vous permettra de répondre à plusieurs questions :
- Ai-je été dérangé.e par la présence d’un cadavre ?
- Ai-je été dérangé.e par les gestes du/de la thanato ?
- Est-ce que je me vois faire ça, tous les jours, plusieurs fois par jour ?
- Suis-je prêt.e à être face à des corps très abîmés, pourris, accidentés, suicidés, (très) jeunes ?
Les réponses idéales doivent être : non / non / oui / oui.
L’avantage d’une observation de soin est aussi de poser des questions au/à la professionnel.le qui vous accueille. C’est un moment privilégié, où il n’y a pas de question ou de remarque bête : vous êtes là pour découvrir un métier, autant en profiter pour discuter du quotidien de thanato, des cas particuliers, du rythme etc. Cela vous aidera à vous projeter concrètement dans ce travail, et réfléchir à votre engagement vers cette formation.
Après la formation ?
A la fin de la formation théorique, vous obtiendrez une attestation de formation. Celle-ci est valable 5 ans, ce qui signifie que vous pouvez passer le concours théorique jusqu’à 5 fois après obtention de cette attestation. A l’issue de ces 5 ans, si vous n’avez toujours pas obtenu le Graal, il faudra repasser une formation théorique. La plupart des organismes de formation propose des sessions de révision avant le concours, ouvertes même aux redoublants.
A savoir que la formation théorique vous offre la possibilité de partir vers d’autres métiers : agent de chambre funéraire, agent de chambre mortuaire, assistant-légiste…
Le concours théorique
Le concours théorique de thanatopraxie se déroule une fois par an, en janvier, au centre d’examen d’Arcueil en région parisienne. Il se déroule sur une journée, en deux sessions (matin et après-midi).
!! Sans l’obtention du concours théorique, il est strictement impossible de continuer la formation de thanatopracteur !!
Le concours théorique a un numerus clausus. C’est à dire qu’il ne s’agit pas d’avoir la moyenne, d’avoir un minimum de points etc… il faut être dans les meilleurs. Jusqu’à 2024, le numerus clausus était fixé à 65 places. Pour le concours 2025, le numerus clausus a été augmenté à 70 places. Pour la session 2024/2025, on a recensé 485 participant.es, redoublants et primo-entrants.
Le concours se déroule en deux parties de 3h chacune : une épreuve de QCM notée sur 130 points, et une épreuve de QRC (questions à réponses courtes) sur 70 points, pour une note totale sur 200 points.
A noter aussi qu’une note équivalente à 0/20 aux sujets de législation funéraire et théorie des soins entraîne une élimination au concours théorique.
Les résultats du concours sont publiés par le Ministère de la Santé courant du mois de février, avec les notes du candidat et son admission ou non. Si vous êtes admis.e : félicitations, le plus difficile est passé. Vous vous engagerez ensuite vers le stage pratique et la dernière étape, l’examen pratique.